lundi 28 septembre 2009

Roman Cindy Manche au soleil - Chapitre 2 : Sexe, mensonges et boîte bento




Cindy Manche en eut le souffle coupé. Armand Bitieux, en slip kangourou, la gorge tranchée, les bras en croix sur le capot de la Jeep, c'était un spectacle inattendu ! Jamais, elle n’aurait imaginé voir son directeur du service comptabilité… mort. Si Cindy était incapable de crier et d’appeler au secours, elle eut quand même la présence d’esprit de fuir à toutes jambes. Terrifiée à l’idée de tomber nez à nez avec le meurtrier dans l’ascenseur, elle grimpa quatre à quatre les marches de l’escalier de secours. Au rez-de-chaussée, elle sauta dans les bras du molosse de garde… Puis, s’évanouit.

Elle se réveilla, allongée sur le vieux canapé en cuir de l’accueil. Au-dessus d’elle le regard inquiet du garde, également sauveteur du travail, et qui malgré son regard bovin et son air de ne pas y toucher, avait eu la présence d’esprit de lui faire les premiers gestes d’urgence. Il n’avait pas appelé les pompiers car il avait tout de suite vu que Cindy était seulement en état de choc. Et surtout, il savait que La Société avait le goût du secret…

Quand Cindy eut les yeux grand ouverts, le molosse l’attrapa avec douceur, la souleva comme une princesse et, sans même tituber, la transporta jusqu’à une petite porte cachée derrière son comptoir de surveillance. Ils passèrent la porte. Cindy était toujours muette mais son cerveau fonctionnait à toute vitesse. Dans le bureau caché, il y avait moult écrans diffusant en direct des scènes volées dans tous les openspaces de la tour. Le molosse continua son chemin, poussant une autre porte. Derrière, installé à une grande table de travail en verre, dans une étrange pénombre – aucune fenêtre n’éclairait l’endroit et seule la lumière d’une petite lampe jetait quelques éclairs dorés-, un homme en costume gris foncé, les yeux cachés par des grosses lunettes noires, le crâne dépourvu de tout cheveu semblait parfaitement concentré sur son talkie-walkie.

En entendant les pas du molosse chargé de Cindy, il leva la tête. Sans un mot, il se redressa et s’avança vers eux et sans même attendre que Cindy touche le sol, il lança : « Bonjour, je suis Hervé Yograin et mon collaborateur Filipo Lisse m'a averti immédiatement de votre malaise. J'ai donc visionné au plus vite nos vidéos de surveillance et je sais tout. Malgré un léger angle mort, on saisit parfaitement tous les éléments. Alors pour mieux comprendre tout ça, nous allons redescendre tous les trois au deuxième sous-sol. »

Cindy tenait à peine sur ses jambes mais Filipo Lisse et Hervé Yograin la soutenaient si fermement sous les aisselles qu'elle avait la sensation de voler. Ils la traînèrent jusqu'à la Jeep. Et là, à la lumière de la lampe de poche du gardien, elle réalisa que la situation était bien plus que grave que prévue. Non seulement Armand Bitieux avait le cou cisaillé mais son slip kangourou n'était pas de couleur rouge, il était imbibé de sang.

« Il va falloir éclaircir tout cela Mademoiselle Manche », hurla méchamment Yograin à l'oreille de Cindy.

A ce moment critique, Cindy songea qu'il fallait qu'elle trouve un moyen de se détendre. Elle inspecta les épaules du directeur de la sécurité à la recherche de quelques petites pellicules. Elle eut à peine le temps d'examiner son interlocuteur qu'il planta ses yeux dans les siens comme un affreux serpent.

« Vous savez, Mademoiselle Manche, il y a encore quelques jours, j'avais des cheveux. Mais grâce à nos systèmes de vérification des données nous avons intercepté sur nos réseaux un document signé de votre nom et comportant de passionnantes observations sur l'impact déstressant du comptage de pellicules. Des théories formidables que nos directeurs des ressources humaines vont mettre en application dans leurs cursus de formation. Quant à moi, je refuse d'être un vecteur de zénitude. Je me suis donc rasé le crâne. »

La cervelle de Cindy fonctionnait à plein pot. Elle eut soudain un haut-le-coeur : « Mais ce projet est à moi, salaud ! Vous n'avez pas le droit de me le voler... »

« Sauf si vous êtes hors circuit Mademoiselle Manche. Et compte tenu de la situation – l'un de nos directeurs égorgé, sans doute émasculé vu l’état de son slip, alors que vous étiez à ses côtés au deuxième sous-sol c'est bien ce qui risque d'arriver. »

« Mais vous n'avez aucune preuve. Rien sur vos vidéos et tous vos mouchards », se défendit Cindy.

«Les mouchards, on peut toujours s'arranger avec », lui susurra Yograin.

Et tandis que Cindy sentait un reste de son souffle lui caresser le cou, Filipo Lisse, se jeta sur elle, lui colla un gros morceau de Scotch sur la bouche et lui banda les yeux avec un foulard. Cindy avait peur, perdue dans le noir.

Pendant que Cindy découvrait le cadavre, s'évanouissait puis sombrait dans les ténèbres… la vie continuait son immuable cours. Les openspaces se remplissaient. Les bruits de couloirs recommençaient. Les imprimantes recrépitaient. Et Eva Kanss arrivait au bureau avec la folle envie d'aller se repoudrer le nez. Elle posa son sac sur son bureau. Remarqua les affaires de Cindy Manche et songea que cette fille était vraiment fayotte, toujours la première au turbin. Elle sortit sa bento box de son sachet en plastique. Après un petit tour aux toilettes des filles, elle glisserait sa gamelle dans le frigo commun de l'openspace.

Se repoudrer le nez était pour Eva Kanss, une étape essentielle pour bien commencer la journée. Elle s'enfermait dans les toilettes et démarrait sa petite séance. Installée sous la bouche de ventilation, elle dégustait une petite cigarette bien méritée. Puis, elle se lavait les dents pour laisser croire à ses collègues accros à la clope qu'elle avait réussi à se débarrasser de cette vilaine habitude depuis trois mois. Elle se dessinait ensuite, au crayon noir, de sublimes yeux de biche, se peignait la bouche en rouge, ajoutait un nuage de poudre, peaufinait ses pommettes au blush. Et constatait qu'elle était belle. Elle restait alors en admiration devant son image sous la lumière jaune du néon.

Durée de l'opération : 15 minutes et 48 secondes.

De retour à son bureau, elle s'occupait de sa bento box contenant un repas bio, fait maison, parfaitement équilibré. Mais ce jour-là, elle remarqua que le couvercle n'était pas bien emboîté. Cela l'étonnait car, elle veillait, chaque matin, en préparant son déjeuner à ce que tout soit très correctement fermé. Elle avait un côté maniaque qui plaisait beaucoup à ses employeurs.

Elle s'assit à son bureau, saisit son bento pour le remettre d'aplomb. Mais, en le manipulant, elle remarqua des traces rouges sur la boîte. En bonne végétarienne, il était impossible qu'elle ait mis du sang sur sa gamelle. Et elle ne contenait pas non plus de fruits rouges car ce n'était plus la saison. Il y avait quelque chose qui clochait. Elle ouvrit son bento. Et ce qu'elle découvrit la glaça d'effroi.

Sur sa salade de graines germées et de tofu soyeux trônait un sexe d'homme qui avait dû être très vigoureux.

Ce pénis sectionné appartient-il à Armand Bitieux?

Qui l'a déposé dans la bento box d'Eva Kanss ?

Cindy Manche échappera-t-elle vivante à ses geôliers ?

Rendez-vous lundi prochain pour le prochain chapitre du Roman feuilleton du lundi.

3 commentaires:

  1. excellent, j'ai hâte de savoir la suite...
    Bravo !

    RépondreSupprimer
  2. Merci Constance, à très vite pour de nouvelles aventures...

    RépondreSupprimer
  3. Vous êtes loin de m'avoir déçu ! Félicitations, j'ai hâte de savoir la suite.

    RépondreSupprimer

 
compteur pour blog